Juridiciarisation des conflits dans la mise en marché collective des produits agricoles au Québec
1 Département d'économie agroalimentaire et des sciences de la consommation, Université Laval. • Candidate au doctorat
Abstract
À titre de régulateur économique, la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (RMAAQ) tranche les litiges contractuels entre organisations de producteurs et acheteurs qui découlent du cadre réglementaire et conventionnel applicable. Depuis quelques années, plusieurs indices portent à croire qu’un phénomène de judiciarisation de la résolution des conflits s’est développé, se répercutant notamment sur l'efficacité du processus de la RMAAQ et la performance globale du système. Qu’en est-il ? Quels facteurs contribuent à alimenter ce phénomène s’il existe réellement ? Dans une logique exploratoire, nous répondons à ces questions en documentant les composantes du processus et leur évolution depuis une quinzaine d’années, au travers l’analyse de 17 entretiens conduits auprès des offices, des acheteurs accrédités et d’avocats actifs dans ce domaine réglementé. Ce que nous retenons est que la judiciarisation des litiges n’est pas tant quantitative, mais plutôt qualitative. Les résultats montrent une judiciarisation accrue des litiges due à la complexité des enjeux économiques, à la dynamique et les rapports entre les intermédiaires devant la RMAAQ et à la faiblesse des modes alternatifs. De plus, un cycle de contrôle judiciaire des décisions de la RMAAQ, dans la décennie 2000-2010, semble avoir été déterminant. Depuis, une culture juridique s’est réellement institutionnalisée dans le processus résolution des conflits et la RMAAQ tente de la prendre en charge. L’article contribue à décrire un phénomène aux conséquences potentiellement nuisibles aux coûts de fonctionnement de la mise en marché collective et à explorer une importante institution du secteur agroalimentaire québécois encore peu analysée.